Comment le système éducatif français se saisit-il de l’intelligence artificielle générative ?

Comment l’école française s’empare-t-elle de l’intelligence artificielle générative ?

Dans un contexte marqué par la rapide montée en puissance des intelligences artificielles génératives (comme ChatGPT ou Mistral), le système éducatif français se retrouve face à un défi de taille : comment intégrer ces nouveaux outils de manière constructive, éthique et équitable ?

L’article d’Éric-Pierre Gallié et Élodie Paitel, publié en mai 2025 dans Les Annales des Mines, fait le point sur l’état des lieux et les perspectives. Il montre que si l’IA est déjà présente dans certaines pratiques scolaires, son intégration reste encore partielle et parfois improvisée.

Un virage en cours… mais encore à structurer

Face à l’arrivée massive de ces outils dans le quotidien des élèves, le ministère de l’Éducation nationale a lancé début 2025 une grande consultation pour élaborer une charte nationale encadrant l’usage de l’IA en milieu scolaire. Cette charte, attendue pour le printemps, vise à fixer des principes clairs, définir les bons usages et poser les limites éthiques nécessaires (respect des données, non-discrimination, fiabilité des contenus…).

Mais pour les auteurs, il ne suffit pas d’encadrer. Il faut aussi penser une stratégie éducative nationale à long terme, en lien avec les usages de terrain, les attentes des enseignants et les besoins des élèves.

Des usages encore balbutiants… côté enseignants

Si les élèves se sont rapidement emparés des IA génératives (par exemple pour s’aider à faire leurs devoirs), les enseignants sont encore en retrait : moins de 20 % d’entre eux déclarent utiliser ces outils régulièrement. Cela s’explique par un manque de formation, d’accompagnement, mais aussi par des incertitudes pédagogiques et juridiques.

Heureusement, des initiatives locales émergent : certaines académies ou établissements élaborent leurs propres chartes d’usage. L’idée est de sécuriser les pratiques, tout en ouvrant des espaces d’expérimentation.

De vrais potentiels pédagogiques

L’IA générative ne remplace pas l’enseignant, mais elle peut devenir un assistant précieux : aide à la création de ressources, génération d’exercices, correction automatisée, différenciation pédagogique… Certains outils permettent aussi de mieux personnaliser les parcours d’apprentissage, notamment pour les élèves en difficulté ou à besoins spécifiques.

Dans l’enseignement supérieur comme dans le secondaire, des expérimentations montrent que l’IA peut aussi soutenir la créativité des enseignants et gagner du temps sur certaines tâches répétitives.

Mais des risques à ne pas négliger

Toutefois, les auteurs rappellent les limites : les IA génératives ne sont pas infaillibles. Elles peuvent produire des erreurs, des « hallucinations », ou reproduire des biais. Il faut donc développer l’esprit critique des élèves et des enseignants face à ces outils.

D’autres enjeux sont soulignés : le respect du droit d’auteur, la protection des données, mais aussi la durabilité écologique (les IA consomment beaucoup d’énergie) et l’équité d’accès. Il ne faudrait pas que l’usage de ces outils creuse les inégalités entre établissements ou entre élèves.

En conclusion

L’intégration de l’IA générative dans l’école française est bel et bien en marche, mais elle reste encore inégalement répartie et insuffisamment accompagnée. Pour Gallié et Paitel, l’enjeu n’est pas seulement technique ou technologique. Il est profondément pédagogique et politique.

Ce que les auteurs appellent de leurs vœux, c’est une stratégie nationale cohérente, qui repose sur une charte claire, une montée en compétences des enseignants, des usages pensés collectivement… et un effort pour garder l’humain — professeurs comme élèves — au cœur de la relation pédagogique.

Retrouvez également cet article directement en ligne dans le dernier numéro de Mai 2025 du dossier thématique « L’intelligence artificielle au quotidien » (101 pages) de la revue RÉALITÉS INDUSTRIELLES :