Présentation de Sophie PICARD (⏱️ 22 min)
Sophie Picard est DETU d’une licence ALLSH et s’intéresse à ce titre à l’évolution du premier cycle universitaire. Elle nous parle de ses expériences d’utilisation des IA génératives dans son enseignement en Licence LLCER allemand. Elle est depuis longtemps sensibilisée aux questions touchant le développement des IA, en particulier pour ce qui concerne les systèmes de traduction automatique [ces développements sont à l’origine de la technologie des « Transformers » — le « T » de « GPT » — à la base des IA génératives textuelles]
Sophie Picard commence par décrire son utilisation « naïve » des IA génératives dans ce contexte de formation. Elle pointe les difficultés (manque de temps) posées à un Enseignant-Chercheur afin de maintenir une veille technologique sur des outils soumis à de fortes évolutions.
Mais la nécessité de prendre en compte l’émergence des technologies d’IA génératives dans la formation lui a donné l’occasion de remettre (du moins pour le premier cycle) une forme d’expérimentation au coeur de son enseignement, aussi bien du point de vue enseignant que du point de vue étudiant : cette situation pourrait ainsi être l’occasion d’un retour des modalités de formation par la recherche, dont on constate une lente érosion dans la formation universitaire du premier cycle.
Au cours de l’année qui vient de s’écouler (depuis janvier 2023), ces expérimentations ont montré comment une co-construction pédagogique pouvait s’opérer entre enseignants et enseignés. Il faut noter que les séquences d’enseignements ayant utilisé les IA génératives ont naturellement pris une forme relevant des pédagogies actives : l’aspect expérimental a permis — aux étudiantes et à l’enseignante — d’apprendre à la fois hors d’un cadre prédéfini et dans une perspective ouverte.
Un des points de départ de la réflexion pédagogique de Sophie Picard est parti d’un constat sur les lacunes méthodologiques attachées à la lecture d’un texte : « si un texte possède d’apparentes qualités formelles, alors son contenu est nécessairement fiable ». Ce préjugé classique — qui sous-tend le problème de l’esprit critique — est réinvesti de manière frappante et originale à propos des textes synthétiques : ces derniers mélangent des qualités formelles (bonne syntaxe et cohérence sémantique) à des « hallucinations » parfois grossières, aussi bien qu’à des biais beaucoup plus insidieux (dus à la nature de ces IA et à leur paramétrage). Un vieux problème — exercer son esprit critique — est alors replacé dans un contexte technologique en forte évolution, posant à la fois de nouvelles questions et mettant en jeu de nouveaux risques (ou disons de nouvelles modalités pour les risques classiquement attachés à l’exercice de son esprit critique — e.g. les risques de désinformation). C’est dans cette situation inédite, que l’enseignante et les étudiantes ont été amenées à co-construire à la fois les modalités d’enseignement aussi bien que de nouvelles pratiques d’étude, les mettant de fait dans le contexte pédagogique expérimental déjà mentionné. Ces expériences pédagogiques avec ChatGPT, ont ainsi été l’occasion de renverser une situation déstabilisante, en transformant la remise en question de l’enseignement face à ces nouvelles technologies, en un prétexte pour réapprendre à lire, à analyser et à évaluer une production écrite.
En conclusion l’émergence des IA génératives dans l’étude et l’enseignement donne l’opportunité de replacer l’expérimentation au coeur de nos formations : en provoquant (au sein du groupe pédagogique) la discussion sur ce sujet, on observe que ce processus amène les étudiants à produire une réflexion éthique sur des questions qui non seulement les concernent, mais qui constituent aussi un défi pour les équipes pédagogiques. Aussi, dans cette co-construction des futurs possibles de la formation, il est important de ne pas oublier le rôle essentiel des étudiants.
Support de la présentation
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